"On peut considérer les droits de l’homme soit comme une morale universelle qui s’impose à toutes les autres – c’est l’esprit de la Déclaration de 1948 –, soit comme une idéologie qui pourrait un jour rejoindre le cimetière des grandes idées en « isme » du XXe siècle. Pour que cette exigence qui est aujourd’hui menacée parvienne à survivre et à se développer, il faut renoncer, selon moi, au vocabulaire sacralisé d’origine chrétienne qui accompagne la défense de son universalité. Ce sacré a été laïcisé, bien sûr, mais il exprime une philosophie d’origine occidentale qui n’emporte plus l’adhésion en Asie ou en Afrique : ces pays veulent aujourd’hui parler à égalité avec l’Occident.
Plutôt que de leur apporter la « vérité », il faudrait donc désacraliser l’évidence culturelle des droits de l’homme, désoccidentaliser leur histoire et démythifier le récit hagiographique et téléologique qui les accompagne. Le décorum parareligieux, voire millénariste, des droits de l’homme est un frein à leur généralisation : il est aujourd’hui important de montrer au contraire que les traditions philosophiques ou religieuses des cultures non occidentales et non chrétiennes portent, elles aussi, une attention à la dignité de l’être humain qui peut constituer un bien commun à tous les hommes."
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/06/70e-anniversaire-de-la-declaration-universelle-des-droits-de-l-homme-la-fin-d-une-utopie_5393556_3232.html
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire